Lettre de Félicien Rops à [Ernest Alexandre Scaron]

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Fais-moi le plaisir de m’expédier un billet blanc (un effet de commerce.) – Il fait ici une chaleur crevante, pas moyen de demeurer une heure au théatre, il ne reste d’autre Consolation que les Courses de Chantilly & de La Marche qui se donnent dans les bois & à l’ombre. Le soir Paris redevient charmant, mystérieux & amoureux, les femmes passent comme dans les décors japonais les mains pleines de fleurs, les robes à l’empire serrées aux hanches ; & les yeux bordés de

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Pencil indien semblent encore plus étranges dans la demi obscurité des squares. – Quelle ville folle & incroyable & comme cela est à deux mille lieues de ce Bruxelles froid compassé sans initiative sans mouvement, sans passion, sans nerfs. On dîne à neuf heures du soir sur des terrasses à St Germain ou à Ville d’Avray. – On a devant soi des vallées de dix lieues illuminées a giorno, avec la Seine au milieu de tout cela charriant la voie Lactée, on sent là dix millions d’habitants dont pas un ne dort, c’est merveilleux, fou, babylonien.

Je dînais hier avec un marin français un ami de Gouzien qui a fait huit fois le tour du monde, un poète & un artiste & qui me disait que ce qui l’avait le plus ému, c’était « la terrasse de St Germain par les nuits d’été » Que c’est beau, que c’est beau ! cela ne se raconte pas, on trouve des groupes

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de parisiennes dans l’herbe, sous des Palmiers, comme au Gange. – Il faut, je veux que tu viennes l’an prochain au mois de mai, c’est le vrai Paris, le Paris que les imbéciles de Namur ne connaissent pas, Namêche Richald & Charlier ne peuvent pas le comprendre, mais les Anglais les Russes les Américains, les amoureux & les artistes du monde entier le connaissent & ne veulent plus le quitter. Je n’ai qu’un regret c’est que tu ne sois pas ici avec moi