Lettre de Félicien Rops à [Charles De Coster]

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Ah ça te fiches-tu de moi avec les idiotîsmes que tu m’écris, Mon Cher ami il faut te donner des douches, cela te fera grand bien. N’as-tu jamais mis le pied dans une imprimerie ? tu en parles comme Mr Coremans, en un mois on imprime chez Lacroix quinze volumes comme le tien, l’imprimerie Lacroix est une des plus grandes imprimeries de Paris, garde donc pour les imbéciles tes balivernes de grand enfant : comme quoi « il faut trois mois pour imprimer ton volume » Du reste est ce que tu crois que je me laisse berner comme cela ? Comment ! nous décidons entre nous le format, je fais revenir des plaques, j’achète une presse pour travailler ici, presse dont je n’avais nul besoin, je fais des croquis & lorsque je me mets à l’ouvrage après un retard de force majeure de quinze jours, tu m’écris de te renvoyer ton

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volume, sous le prétexte qu’il faut 3 mois pour l’imprimer ? – Tu auras tes volumes le 15 septembre contre échange des deux autres, que tu l’exiges ou que tu ne l’exiges pas, cela m’est égal ; c’est mon droit, le droit d’un artiste qui a accepté d’illustrer un livre & qui a fait des frais pour ce susdit livre. Il ne te manque plus, ma parole d’honneur ! que de me reprocher d’avoir été malade ; depuis deux jours je suis levé, Mardi & Mercredi j’ai dû de nouveau rester au lit toute la journée. Ainsi tu as compris hein ? Tu auras tes deux premiers volumes le 15 septembre, pas avant parce que tu n’as pas besoin de ces volumes avant cette date, tu passes ta vie à faire des tours d’écureuil en cage & à te jouer à toi-même des scènes d’agitation qui n’avancent rien & qui finiront par t’établir une réputation d’aliéné.

Je ferai & je fais douze eaux-fortes dans le format décidé, accepte ou n’accepte pas cela m’est égal, je les fais parce que j’ai

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promis de les faire, que cela est décidé, & surtout parce que je me suis promis à moi-même de les faire & que je les fais. Au lieu de grossir la section des Agités de Gheel tu ferais mieux de me laisser travailler en paix & pendant ce temps de recopier & retravailler consciencieusement tes deux derniers volumes qui sont écrits par un élève de quatrième – professionnelle. Cela servirait au moins à quelque chose. Encore un conseil : Ne vas pas embêter Lacroix inutilement, il finira par t’envoyer faire foutre toi & ton volume & tu seras le bec dans l’eau. Un dernier mot : Si tu veux absolument ton volume viens le prendre, seulement je te préviens que je ne ferai ni frontispice ni rien du tout devant la folie de tes procédés.

Et maintenant fais-moi le plaisir de me laisser travailler en paix en me privant de ton excellente prose.

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