Lettre de Félicien Rops à [Édouard Émile Louis Dujardin]

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Deux mots Mon Cher MrDujardin pour vous dire que du 5 au 6 août vous tiendrez vos épreuves.

J’ai été malade, & très malade Le médecin m’a oté toute permission de travail, & de rêverie pure, même, m’a été interdite. – J’ai dû vivre comme un receveur des Contributions qui n’aurait pas de Contributions. J’aime mieux mourir de mâle mort, ou alors qu’on me nomme Roi des Belges. Roi d’un pays dont le nom n’est pas un substantif mais un adjectif ! Quelle gloire !

Bref je grave le frontispice car c’est un frontispice ! Nous l’appellerons « Ex-libris » mais cela l’embêtera, je le sais.

Certes, il n’est pas digne du très grand poète qu’est Mallarmé, Mais je le trouve « intéressant » (Ah cette vanité ! cette terrible vanité ! cette vanité française ! Vite au Musée du Louvre, cochon ! et humilie toi le front dans ta boue !)

Je vous télégraphierai le jour de mon retour, & je vous expliquerai « mon œuvre » car c’est ma gloire : elle a besoin d’explication ! & elle préparera des tortures aux Saumaise futurs de l’iconographie.

C’est mon honneur vous dis-je

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j’ai fait venir un musicien, un peintre jeune & un littérateur « de profession » mes « Pierre de Touche », Rien compris du tout !

C’est ma fierté !

Je n’ai pas l’adresse de MrTeodor de Wyzewa, voulez vous bien le remercier grandement des trop nobles paroles écrites par lui à mon endroit à propos du livre Péladan. Hélas dites lui que je ne suis qu’un lutteur et un lutteur manchot – né sans bras comme MmeLouise Collet était : née Revoil, & Cochinat à la Guadeloupe. Je me bats comme Jacob avec l’Ange ! toutes les nuits & je me réveille à terre & meurtri & courbaturé. Peut être les bras me pousseront-ils ainsi que les tentacules aux pieuvres, mais il est temps, il est temps ou je deviendrai fou, ce qui est peut être la plus aimable d’aller à Dieu.

Excusez moi vos angoisses, mais les miennes sont grandes quand je touche un crayon aussi ! & que j’ai là – devant moi un modèle qu’il faut faire parler pour quelques uns, pour le moins possible d’êtres.

Et quand j’aurai fini, vous me donnerez : à la gloire d’Antonia – n’est ce pas ?

Écrivez : à la Demi-Lune près Moulin Galant (Seine & Oise)