Numéro d'édition: 3057
Lettre de Félicien Rops à [René Pincebourde]
Texte copié
Expéditeur
Félicien Rops
Destinataire
René Pincebourde
Lieu de rédaction
s.l.
Date
1894/06/28
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
8813/t7/p133+8813/t7/p134
Collationnage
Tapuscrit Lefebvre - Kunel
Date de fin
1894/06/28
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, Archives de l'Art Contemporain
Page 133
Aux champs, le 28 juin 1894
Une fois pour toutes, mon brave Monsieur Pincebourde, je vous ai déjà dit mon aversion pour tout bavardage inutile « par lettre ». C’est du temps perdu, j’ai mieux à faire ! Encore une fois j’ai horreur de faire des affaires mesquines, piegriechères, pincemailleuses, et autres « grippasoliaretés ». Je vends comme je dépense, largement et en me fichant de l’argent. D’autant plus que vous vous entendez en œuvres d’art autant q’un Dahoméen, ancien régime. – Puis il faut vous répéter, 2.000 fois les mêmes choses ! Je les répète donc.
1° Je ne vends pas moins de 50 épreuves sans retouches, au prix que vous connaissez. (j’ai bien voulu, en souvenir de nos anciennes relations, vous donner à des prix grotesques, une collection d’preuves retouchées, en souvenir de notre regretté Malassis, mais ce que j’ai fait par gracieuseté, d’ailleurs imbécile, ne constitue pas une coutume.) – Je vous ai présenté, à prx enfantin, le dessin promis, vous n’en avez pas voulu, il était vendu deux heures après votre exode de l’atelier, plus cher que le prix que je vous avais proposé. Maintenant quand j’en aurai un disponible, j’aime autant vous en vendre un, qu’à un autre. Je vous enverrai une carte postale pour vous dire : venez. Vous regarderez le dessin, je vous en dirai la valeur, vous tairez vos jérémiades habituelles, en levant les yeux au ciel, qui ‘a rien à voir en ces matières, si le dessin vous convient, vous le prendrez sous le bras, et vous le reporterez sur la rive gauche, s’il ne vous va pas, vous rentrerez en vous-même l’expression de votre opinion artistique, et vous me tirerez votre révérence. Votre amateur me fait l’effet d’un pleutre avare et sans goût, donc je m’en fiche comme d’un bout de cigare éteint, le mégot classique ! Quant aux épreuves, il est probable que vous ne les aurez
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pas. Je les avais mises dans la petite collection de 50 épreuves refusées par vous. Je ne tirerai plus ces épreuves avant deux ans. Je vous l’avais dit d’ailleurs aussi, votre défiance de bon gratte-liard vous porte à ne pas croire ce qu’on vous dit, tant pis pour vous, vous vous en passerez. – Quant aux Sataniques, peut-être pourrai-je vous en envoyer ou plutôt vous dire de venir les prendre si le prix ne vous effraie pas, et ne vous fasse pas frémir jusque dans vos fontes. Je travaille à de nouvelles collections tirées à trente épreuves. – Tous mes tirages seront désormais très limité. Je serai toujours Place Boieldieu, le Jeudi jusqu’au 20 juillet, le Jeudi de 10 à 11 heures du matin. Jeudi prochain si vous le voulez, venez me voir, – cela ne me dérange en rien et n’oubliez pas votre lamentationphone s.v.p. Comme je ne veux pas vous induire en tentation de vendre ma prose à Chavaray, je ne la signe pas. Vous pouvez dire que cette lettre est de Chateaubriand avant sa première communion.
Le vieux de la Montagne
N.B. Je vous enverrai Dimanche les corrections Demolder. Après le 20 juillet, je quitte Paris pendant Août et Septembre. Le 1er octobre, je reprends mes Jeudis, mais ils auront lieu à mon atelier 4, rue du Marché des Blancs manteaux. Vous voyez Cher Monsieur Pincebourde que je suis toujours le même et que je ne suis pas plus mal disposé à votre égard. Donc probablement : pas d’épreuves possibles que celles que je vais acheter en Belgique où je vais le 20 juillet. Peut-être pourrai-je Jeudi vous montrer quelques croquis mais il n’y aura pas moins de 150 frs. Vous êtes prévenu. Et je ne m’engage à rien.
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