Page 1 Recto : 1
Paris 28 février 1880.
Mon Cher Monsieur Noilly
Je viens vous prier d’acheter les douze dessins ci-joints conditionnellement au prix de mille francs les douze, prix auquel je les ai moimême rachetés.
Je vais m’expliquer mieux : si ces dessins ne vous plaisent pas, – si vous n’aviez pas le désir de les faire entrer dans votre collection, – si vous en trouviez le prix trop élevé, – enfin si pour une autre cause quelconque vous ne vouliez les acheter définitivement, je m’engage à vous les reprendre au même prix, dans deux mois, le 1er mai 1880.
– Comme vous le voyez Mon Cher Monsieur Noilly c’est véritablement un service que je viens encore vous demander. Je vous l’ai dit j’ai été fortement échaudé en ayant la faiblesse d’endosser les billets d’un vieil ami dans la gêne & j’ai été obligé de les rembourser. Je ne m’attendais pas à cela & j’ai été un peu pris au dépourvu. J’ai fait cependant face à toutes ces désastreuses échéances, aujourdhui écheoit le dernier billet & il ne me manque que peu de chose pour couvrir cette dernière échéance.
Dans ma position il m’est de toute impossibilité de vendre au premier venu cette petite
Page 1 Verso : 2
collection, puis j’ai, je vous l’avouerai, un amour propre d’auteur & de père. Je ne pourrais plus refaire ces dessins, – je suis dans un autre ordre d’idées, puis je n’ai plus la vue assez bonne pour exécuter des dessins qui sont presque des miniatures comme le frontispice de Gamiani par exemple. Je les ai rachetés pour qu’ils ne tombent pas dans des mains indignes.
Vous avez toujours été si gracieux pour moi que je n’ai pas craint de m’ouvrir à vous de cette petite gêne momentanée, vous me ferez un vif plaisir en consentant à ce petit arrangement qui sauvegarde tous vos intérêts d’ailleurs, & vous me rendrez un très réel service que je n’oublierai pas plus que celui que vous m’avez déjà rendu avec tant d’obligeance. –
Je vous avoue que je serai très heureux d’avoir hors du pied cette dernière épine ; – tout cela me sera une leçon pour l’avenir. Comme je ne sais pas à quelle heure je pourrais vous voir, vous mettriez le comble à votre complaisance en m’envoyant ces mille francs 76. Rue Richelieu le plus tôt possible. C’est la fin du mois & de mes maux ! –
Ainsi comme je vous l’ai dit en commençant Mon Cher Monsieur Noilly, il est bien entendu que si pour n’importe quelle cause vous ne voulez pas faire entrer ces dessins dans votre collection, je vous reprendrai le 1er mai prochain ces dessins au prix de vente.
Je vous remercie d’avance, & je vous prie d’accepter Cher Monsieur mes Civilités affectueuses
Félicien Rops
Page 1 Verso : 3
Voici la liste des dessins que je vous envoie :
– Nuit d’Été (agrandie – fixée)
N°99 – Le Divorce – Constatation des Sévices graves !
(si ce dessin ne vous paraissait pas assez fini je le pousserais d’avantage, c’est pour cette raison que je ne l’ai pas fixé. – J’ai eu peur en le poussant plus loin de lui ôter de sa fraîcheur.)
N°1 Frontispice du Parnasse Satyrique
1er vol.
N°2 Frontispice du Parnasse Satyrique
2e vol.
N°3 Frontispice de Serre-Fesse
(Il y a eu deux dessins de ce frontispice dont l’un moins complet que celui-ci a été vendu à Cadart.)
N°4 Frontispice des Gaietés de Béranger
N°5 – Frontispice des Priapées de Cantel
N°6 Frontispice du Dictionnaire Érotique.
N°7 – Frontispice de Gamiani.
N°8 – Gamiani – (La Comtesse)
N°9 – Gamiani – (Le Pendu)
Page 1 Recto : 4
N°10 Gamiani – (Le Singe.)
N°11 – Gamiani (Les Moines)
N°12 – Gamiani (La Jeune fille)