Lettre de Félicien Rops à [Edmond Bailly]

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Je reçois seulement aujourd’hui Samedi votre lettre qui m’a été envoyée de la campagne. Elle y est depuis Mercredi. Elle m’a été envoyée le Mardi, sottement, par une des manutentionnaires qui croyait que je devais rester labàs toute la Semaine, – précisément le jour de mon retour à Paris ! – Et voilà comment avec la noble lenteur de ma belle-mère, je n’ai pu avoir votre lettre que aujourd’hui Samedi 21 février à neuf heures du matin.

Mon Cher Ami les raisons qui m’empêchent et qui m’ont empêché de vendre & de tirer des eaux fortes sont d’un ordre intime & je préfère vous les dire que vous les écrire. Je serai Lundi de 1 à 5 à l’atelier, & je vous expliquerai tout cela.

Ce que je peux vous certifier : c’est que je n’ai jamais vendu une eau-forte à un prix inférieur à celui que je vous ai indiqué. Il y a dans ce commerce là des surprises dont j’ai moi déja profité, non seulement pour mes propres eaux-fortes mais encore pour celles des autres. J’ai acheté pour

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70 frs il y a trois mois deux superbes épreuves de planches de Tissot qui se vendent chez Dumont rue Laffitte l’une Cent frs et l’autre 125 frs. Et cependant Tissot ne les a pas vendues à Dumont à moins de 75 frs pièce. Je vous ferai constater la chose. Jamais Mathias n’a acheté une eau-forte de moi, à moi même. Nys lui a vendu une collection d’épreuves douteuses comme choix, rapportée par lui de Belgique, et vendue par la veuve d’un boursier de bas étage appelé Duchâteau, un bonhomme qui n’avait jamais le sou, et qui achetait de bric & de broc les épreuves qu’il trouvait de rencontre aux camelots du passage Bortier. – on doit dans « cette partie » s’attendre à tout cela, et ne pas s’en inquiéter ; les belles épreuves vaudront toujours leur prix, parce qu’elles resteront rares, moi, ne pouvant en tirer pour des raisons que je ne voulais pas dire, mais que je vous dirai.

Quant à vendre « des Rops » ou à ne pas en vendre Mon Cher ami, vous en ferez ce que vous voudrez. Cependant en dehors de mon intérêt, dont je n’ai que trop peu cure ! je crois que le moment est mal choisi. Je suis obligé, (vous saurez encore pourquoi !) de faire une nouvelle série de planches à laquelle je travaille pour l’instant, et elles se vendront comme du pain viennois, – cela est certain. À Lundi donc Mon Cher Bailly et je vous étonnerai je crois.

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