Lettre de Félicien Rops à [Homme inconnu]

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Il faut d’abord avant tout, que vous m’excusiez de ne pas encore vous avoir envoyé les épreuves d’eaux-fortes ; mais cela m’a été de toute impossibilité jusqu’à présent. Je ne suis pas encore réinstallé dans mon atelier, dont on enlève une partie du toit, pour cause de grandes réparations, autorisées par mon bail ; et l’on y ajoute une prise de calorifère : maçons, fumistes, plafonneurs & peintres, j’en ai encore pour une quinzaine de jours. J’aurais dû vous prévenir, & c’est pour cela, & de cela que je m’excuse. Mes cartons , maquettes études sont entassés avec mes cuivres depuis deux mois dans une petite chambre adjacente à l’atelier. Et l’architecte m’assurait que toutes les réparations seraient terminées en un mois : « au plus tard ». C’est éternellement la même chose.

J’ignorais, & on ne m’a pas annoncé la mort du frère de mon pauvre ami Joseph Pradelle. Je ne le connaissais pas du tout & ce qui peut vous paraître singulier : je ne l’ai jamais vu ! Nos goûts de botanistes eussent dû nous réunir. le Hasard en a décidé autrement. MllePradelle ne m’a pas envoyé de lettre de faire-part. Tout ce que vous me dites est parfaitement juste à propos de ma pauvre collection, mais je ne suis pas armé pour faire valoir mes droits ! et ces droits sont moraux ! Jamais Joseph Pradelle ne parlait de ces choses avec sa sœur, dont

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il craignait par délicatesse de blesser les sentiments très religieux. Que faire ? Je vais en écrire aux M MrsCayol, dans lesquels je puis avoir toute confiance, et cela sur l’heure. Si vous avez une idée, ou un moyen d’arracher cette collection à cette brave demoiselle, faites-m’en part je vous prie. Je crains autant, et plus encore la dispersion que l’anéantissement simple, ce qui m’est arrivé avec la collection d’un lord anglais, dans le pays de Galles, il y a un an à peine. Les héritiers réunis ont brûlé cette collection, y compris six dessins de moi, illustrations terribles & d’un sentiment très anti-érotique des Lamentations de Jéremie. Ces canailles de protestants rigides & hypocrites, n’y ont vu que des saletés !! ! Je perds là une œuvre. J’en ai heureusement quelques décalques et je vais les graver.

Ont été brulées à coté des miennes, les collections très rares de Rowlandson et de Dévéria, & les Jules Romain pardessus le marché ! Cela a été un bel auto-da-fé ! Et sous l’œil de l’évêque de Birmingham ! – Lisez dans Certains d’Huysmans ce qu’il dit de cet enragé de Rolawdson. Il a seulement oublié de dire que Rowlandson a montré le fond de porcherie de l’âme de tout Anglais. C’est idéalement le peintre des « cochonneries » qui font la joie de Jonh Bull & Jean le Taureau est bien nommé. Je le connais ! Ivrogne, & pédéraste sous le masque de la Religion Réformée, voilà le tuf ! Et cruel comme tous les Érotomanes.

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