Lettre de Félicien Rops à [Léon Evely]

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Voilà qui est entendu, ces conditions me plaisent assez, & comme je vous l’ai dit nous commencerons bientôt, – les dimensions me vont. Je vous enverrai toujours les croquis ou le dessin avec la reproduction à faire. Pour les reproductions je vous prierai de garder le secret. Vous connaissez la bêtise de la plupart des éditeurs, s’ils savent que l’on se sert de l’héliogravure ils ne savent pas de quelle façon nous nous en servons & ils s’imaginent que nous faisons faire entièrement nos planches par le procédé, ce qui à leurs yeux les diminue de valeur. L’Héliogravure est un aide& une économiede temps pour nous & elle ne doit être que cela, ce qui est déja bien joli.

Venons aux croquis que je vous enverrai. Les croquis les plus curieux que j’ai en portefeuille sont presque tous des croquis de nu ou de demi-nu, faits sur nature. Ce sont les plus intéressants. Vous vous doutez bien que je n’ai pas appris le nu sans le dessiner énormement ! – Il y en a là de remarquables au point de vue de la recherche du nu moderne. Chaque siècle vous le savez a sa façon d’interpréter le nu. Le 19e n’a fait que copier le nu des autres époques ! Je tâche de

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rendre le nu de notre époque. Le nu de la femme de notre temps qui entre & qui ôte son corset & j’y arrive à peu près.

– Il n’y a d’ailleurs rien de graveleux dans ces croquis, ce sont des nudités franches. Je veux seulement savoir si les nudités ont place dans votre album.

Vous pourriez en faire un album à part elles en valent la peine.

Quant aux demi-nudités, je crois que vous n’hésiterez pas.

Je compte faire beaucoup d’essais avec votre procédé & voir même ce que donneront des reproductions d’après études peintes n’avez vous jamais essayé.

De même pour les dessins en couleur.

Enfin nous allons voir tout cela, ce sera fort intéressant pour moi & je l’espère pour vous aussi.

Je suis très content de votre idée de garder les dessins & les croquis pour vous en Album. – Ce sera très intéressant à revoir & cela aura son prix.

J’aiderai à votre collection d’eaux-fortes. Je vais publier cette année des collections numérotées, tirées à un très petit nombre. Mises en vente à haut prix tirées chez moi – avec ma presse, sous mes yeux, – on ne poura m’en détourner une seule épreuve, & leur extrême rareté sera assurée. Le prix moindre sera 25 francs par épreuve. Si vous voulez nous pourrons nous entendre à l’amiable pour un certain nombre d’épreuves,

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suivant l’importance des planches, & vous me feriez des reproductions en échange, comme pour les croquis. –

Je suis très heureux d’avoir quelques collectionneurs en Belgique. J’en ai partout, d’enragés dans le nombre, & c’est en Belgique que j’en ai le moins! Bonvoisin & François Olin sont les deux principaux. Hannon et Lemonnier commencent, les autres n’ont affaire qu’aux marchands. – La collection se subdivisera en deux parties : Tout ce qui a été gravé jusqu’au 1er janvier 1884. – Tout ce qui sera gravé après cette époque « si le Diable me prête vie ». Je vous dis cela parce qu’il paraîtra bientôt en volume (plus sérieux que celui publié par Olivier) qui adoptera ce mode de classement.

Je désirerais avoir aussi la liste des quelques eaux fortes que vous avez afin de pouvoir lorsque l’occasion s’en présente augmenter votre collection avec les œuvres anciennes, en meme temps qu’avec les nouvelles. – C’est ce que je fais pour Hannon & pour le docteur Herman un autre collectionneur Belge. Il faut aussi prendre « les doubles » lorsque vous les trouvez à acheter dans de bonnes conditions parce que l’on fait des échanges. – Tout cela dans nos conventions peut marcher de front avec les croquis & les dessins. Il est impossible de fixer le nombre d’eaux fortes, que je vous donnerais par

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reproduction. Comme pour le reste & comme vous le dites c’est une affaire de bonne foi suivant l’importance, la rareté les dimensions des pièces. Certaines eaux fortes n’ont été tirées qu’à six ou sept épreuves d’autres à vingt, d’autres à cinquante. Il y en a d’introuvables & beaucoup. L’œuvre est rare. –