Lettre de Félicien Rops à [Jules Beaujoint]

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Lorsque j’ai reçu votre lettre, Delvau venait de me quitter, je [res]terai en Belgique jusqu’au 12 février. Je lui ai parlé de vous et longtemps ; – s’il m’avait dit des choses désagréables pour vous, je vous assure, Mon Cher Beaujoint que je vous les répèterais avec franchise, – il y a des circonstances particulières dans lesquelles la brutalité devient un devoir. Delvau m’a dit ceci : « Je crois que Mr Beaujoint a du talent il m’a lu une nouvelle qui est réellement très jolie et que je publierais de suite si j’étais éditeur ; il n’a pas encore d’originalité bien tranchée, mais il sait écrire et cela n’est pas peu de chose ; – ce jeune homme a contre lui une timidité terrible qui finit par vous embarasser vous même et qui pourrait lui faire le plus grand tort, c’est le seul défaut, – si cela en est un, – que j’aie à lui reprocher et il n’en peut rien. » – Si Delvau Mon Cher Beaujoint vous a dit que votre article était bon ; c’est qu’il l’était réellement à son point de vue. Maintenant, il ne faut pas vous faire illusion sur l’influence de Delvau. Delvau qui est un parisien de Paris peut vous faire connaître beaucoup de monde ; éditeurs,

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artistes, gens de lettres etc etc mais quant à vous faire accepter d’emblée par un éditeur quelconque ou à vous faire jouer une pièce, c’est une puissance que personne n’a à Paris à moins que d’être soimême directeur de journal ou de théatre.

Bon [cour]age, ami Beaujoint on arrive toujours quand on a quelque chose dans le ventre,

– je crois à votre grossesse intellectuelle.

– Je ne vais pas à Paris avant le mois de mai à cause de l’Exposition de peinture ; Paris est une triste ville chaque fois que j’y vais je me rappelle les deux vers de Brizeux :

Comment faire en voyant ces modèles étranges Divin Cimabué pour faire tes beaux anges.

On y gagne vite des nausées, c’est pour cela que je reviens si souvent aspirer quelques bouffées d’air pur.