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N’oublie pas je te prie d’expédier ma Caisse le plus tôt possible par grande vitesse. Je cours comme un Chien perdu pour Paul. J’espère que tout va s’arranger ou le fils y mettra de la mauvaise volonté. J’ai pris le taureau par les cornes, – c’est ainsi qu’on prenait toujours le père Pépin, – et je suis allé raide comme la justice trouver Mr de Burlet chef du parti catholique & avocat des jésuites et je lui raconté ma petite affaire. Je lui ai dit des choses simples comme celle-ci : je ne suis pas homme à me laisser prendre mon fils comme un vieux bonhomme au coin de son feu. J’ai bec, ongles, du talent & un burin qui a fait ses preuves et que je vous enfoncerai dans le ventre comme un bistouri. Si on me prend mon fils pendant vingt ans je vous accablerai de caricatures & de dessins, vous aurez en moi un ennemi sans trève, & qui vous fera cruellement repentir de vos infamies Ah ! – Cela a fortement fait réfléchir le monsieur, qui m’a dit : Cela ne se fera pas, mais de votre coté, vous ne nous ferez pas la guerre. (Tu vois que l’argument était bon ! Donnant, donnant, un traité de paix ou de guerre.
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il n’y a plus seulement ici une mère seule & un fils faible. Il y a un père qui arrive par une trappe & qui ne se laisse pas faire. Et ce père n’est pas le premier venu. Il a un nom, du talent & il se fiche des fausses considérations & du quand diras-t-on comme de ses vieux gants. – Je dîne avec cet aimable Mr, ce soir avec d’Aspremont-Lynden. Il va parler au père Castellain, lui-même. Je partirai par le train de nuit après le dîner. Je ferai parvenir les lettres à Charlotte par l’entremise de Caroline. J’ai une dette à payer à ma pauvre femme, je lui rendrai son fils ou j’y creverai. Mais le mal était bien profond, & il n’était que temps !
À toi vieux. – Et l’éditeur qui m’attendait Lundi matin ! – N’oublie pas ma Caisse !!
Bonnes amitiés à Caroline & ne laisse pas traîner ma lettre.
Ton vieux
Fély
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