Lettre de Félicien Rops à [Armand Rassenfosse]

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Je vous ai expédié hier un rouleau d’épreuves de mes essais au vernis mou, anciens, et aussi un essai à la diable, du vernis N°5. – Dans cet envoi se trouvent des épreuves de deux vernis mous faits avec le vernis « de l’avocat ». et une épreuve de la « Maturité » avec la petite tête en marge dont je vous avais parlé.

Décidément ce vernis mou N°5 est bon. Il n’est pas « l’idéal », – mais à son défaut, – et l’idéal ne se rencontre pas toujours, : c’est un bon vernis. En le traitant avec adresse, & en le soutenant par des aqua-tintes légères pour les modelés fins, nous pourrons à ce que je crois en tirer un bon parti.

Son défaut, et cela rentre dans les défauts que l’on ne peut guère expliquer, c’est de n’être pas flatteur. Regardez comme le grain de la petite tête en question – (marge de la maturité,) est « flatteur ». Un rien, quelques coups de crayon, et il en sort un joli grain « bleuâtre » vaporeux, joli à l’œil. – Notre n°5 n’est pas flatteur !! Pourquoi ? Je serais très embarassé de le dire ! Évidemment cela tient à la nature même du grain ; et cependant ce grain n’est pas laid ! – Enfin tel qu’il est je le répète c’est un bon vernis ; & c’est déja un beau résultat, fort utilisable, & dont vous avez le droit d’être satisfait.

Pour l’estompe votre papier japonais fin, que vous avez eu la complaisance de m’envoyer, donne un grain très fin. Il est malheureusement d’une transparence douteuse & assez peluchard sous l’estompe. Mais je veux encore faire d’autres essais avec ce papier, et puisque vous en avez beaucoup, vous serez bien aimable de m’en faire parvenir quelques feuilles. Jusqu’à présent c’est

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le papier le meilleur pour l’estompe de Liège. – Il permet les modelés, si l’on applique le n°5 très légèrement. La principale qualité du n°5 c’est son extrême résistance aux acides, qui me paraît absolue. Et c’est un point important. Il est aussi très diaphane, et s’applique facilement au rouleau avec quelques précautions. – Je vais l’employer pour continuer et reprendre ma planche du « Guérisseur de fièvres » c’est encore le plus pratique de tous !

Vous avez raison : je ne peux me croire malade ! & sans mon docteur qui me défendait absolument de ne pas quitter ma chambre, j’aurais été me promener. Mais la péripneumonie me guettait ! Nous avons perdu en quelques jours, un tas de bons camarades dont le pauvre Garnier, le plus aimable homme qui fut l’illustrateur de Rabelais. Au fond les médecins ne connaissait rien de cette singulière épidémie et ce n’est que lorsque la maladie a enterré dix mille morts, qu’ils ont commencé à gagner peur.

Enfin me voilà remis à ma table de travail, que le diable emporte l’influenza qui m’a fait perdre un mois de ma vie, et « à mon âge » ! – comme je dis aux petites blondes !

Bonnes amitiés & bons Compliments et bon Courage !