Lettre de Félicien Rops à [Armand Rassenfosse]

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Je viens seulement de recevoir votre envoi, & dans ces épreuves il y en a qui m’ont charmé. L’Épreuve de la dame en couleur entr’autres. Cela donne un joli ton, et le répérage se fait exactement à ce qu’il me paraît. Je vous enverrai un petit cuivre que je ferai exprès pour cette expérience. J’ai peur que la Pudeur gouvernementale Belge ne se froisse des planches dont vous me parlez, & ne les retienne en ses cachots.

La planche : – tête de femme à chapeau – faite entièrement à la roulette est très intéressante. La roulette se marie fort bien avec la pointe sèche des retouches de la figure & des cheveux. et d’une façon indistincte. La tête est bien modelée, vous avez probablement repassé en tout sens le travail de la roulette fine ? Encore une question roulettifère : Avez vous ébarbé le travail de roulette ? Les « rouletteurs » de chez Goupil ébarbent presque toujours leurs photogravures. La barbe de la roulette doit être effectivement très délicate & tenir très peu, même aciérée.

Votre étude d’après nature, pointe sèche sur zinc est bien. Savez vous que vous êtes devenu un très bon tireur ? Vous avez de fort bonne encre. Est ce celle que vous faites vous même ? Votre tête de femme à la roulette est sur cuivre n’est ce pas ?

J’ai été plusieurs fois chez Goupil dans l’atelier des graveurs-retoucheurs, ils ont des roulettes qui se tiennent dans la main

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comme des crayons, de petites roulettes ainsi inclinées : –

il y en a de grosses aussi ayant la même inclinaison ; – d’autres ainsi faites :

en forme de petites roues

Elles sont faites à Londres, je n’ai pas pu avoir l’adresse !! Ils ont aussi de tout petits berceaux pour les fonds :

et grainés. Les formes sont à l’infini & ils font tout avec ces roulettes. – Cela marche avec une très grande rapidité. J’ai vu le graveur retoucheur Girardet, retoucher une planche de cinquante centimètres en un jour.

Certaines roulettes à fond, très fines pour les ciels ont cette taille ci : – Il faut tâcher de faire faire cela à Liége. Celles que vous venez de m’envoyer sont très bien faites ; aussi bien faites, et d’un meilleur grain que celles de Paris, mais leur forme est ancienne & gênante. Il faut travailler à plat, tandis qu’avec celles de Goupil la roulette se tient dans la main comme un crayon. Ces outils permettent à Goupil de publier ces belles photogravures qui ne sont que retouches d’un bout à l’autre !

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Seulement Mon Cher Ami, j’exige, que vous me disiez le prix des roulettes & des essais de roulette & je veux participer de moitié dans le prix de ces recherches et des outils. Je crois que vous pouvez faire faire tout par votre ouvrier s’il est payé & bien dirigé. Nous lui ferons refaire des berceaux car la manière noire & j’en ai fait plusieurs, – de pures manières noires, – est un procédé merveilleux. Il se pratique encore en Angleterre d’ailleurs et superbement.

Ici les fabricants de roulettes à grains ne veulent pas les faire et le nom de l’ouvrier de Londres, ou du fabricant n’est pas connu des artistes. Ce sera encore si vous arrivez à un résultat complet, « un secret » à garder aussi.

Par ce temps de chipeurs, il faut se défendre ! et rendre rares tout ses procédés. Moi je ne montrerai plus même mes outils ! J’en suis là ! Il est trop bête de se laisser dépouiller par des imbéciles qui profitent de vos recherches & se mettent dans vos souliers !

À bientôt je vous enverrai des épreuves, et des épreuves d’anciennes planches reprises par notre procédé à grains factices.

Avez vous encore quelques feuilles de papier blanc à grain ? Cela me ferait plaisir. J’en ai, mais je ne peux mettre la main dessus ! Je veux faire quelques essais sur acier.

À Bientôt, – voyez Mr Francotte, Mon Cher Rassenfosse je vous prie et expliquez lui l’affaire Popp – lequel Popp continue à ne pas bouger sous les coups de botte au cul ! Ah ! il y a de jolis caractères !