Lettre de Félicien Rops à [Adolphe Popp]

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Faire admettre « quand même » un tableau refusé, c’est ce que Mr Carnot n’aurait pas le pouvoir de faire, crois-le bien. Les Choses ne se passent pas ici comme dans notre bon petit pays. Si ces messieurs ont été refusés, c’est qu’ils ont exposé de mauvais tableaux, tout simplement ! Il n’y a pas à aller chercher midi à quarante heures !! Pour une autre année prie Mr Passenbronder de me prévenir un mois à l’avance, s’il veut que je recommande ses protégés & que j’use de ma petite influence auprès de mes amis du Jury. L’an dernier sur la recommandation de Ritter j’ai fait recevoir & bien placer MrGondry de Gand. Mais son tableau était : un bon tableau. Ici on est impitoyable pour les mauvais tableaux, & malheureusement la

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Belgique en général, & la ville d’Anvers en particulier, sont des foyers d’infection picturale. Les mauvais tableaux qui figurent de droit à l’Exposition de Paris, & il y en a pas mal, sont les tableaux exemptés par la Vieille loi d’exemption des médaillés. Ainsi Verwée, Jan Verhas & beaucoup d’autres Belges sont exemptés du jury. Beaucoup de Français & d’étrangers sont dans le même cas, & bénéficient de cette vieille coutume, qui va être abolie d’ailleurs, sous peu. Quant à croire que le jury actuel refuse un bon tableau, je m’y refuse moi-même. Le Linnig est un peintre vieux jeu. Cela n’est pas mauvais, & cela n’est pas bon ! – Réputation « locale », bon électeur, brave homme, bon garde civique. Cela n’a rien à voir avec l’art actuel ; qu’ils cuisent & qu’ils cuisinent la bàs leurs petits bonshommes au pain d’épice, & qu’ils les arrosent avec leur petit sirop flamand, qu’est ce qu’ils peuvent nous montrer & nous apprendre, hors de leurs vieilloteries ? On a raison de ficher tout cela à l’air. Voilà mon sentiment Mon Vieux. – Le « Gondry » dont je te parle, le gantois, était un peintre « moderne, avec un œil de demain, & non pas d’avant-hier. Il a été reçu d’emblée & a obtenu une bonne place. Que les Anversois envoient de bonnes choses, & ils seront reçus.

Ton brave Passenbonder, « (est ce comme cela que cela se crache ? – car quand on s’appelle comme cela, on demande au gouvernement de se baptiser Alcindor, & on a un nom que les demoiselles peuvent murmurer sans avoir l’air de vouloir avaler la couronne d’épines de N. S. J. C ! – Et on peut être consul du Pérou tout de même !) me semble un homme aimable pas fort en peinture, ou

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un brave allemand, – « un peu Chuiff » qui veut placer ses Linnig ici.

– Enfin dis lui qu’il m’achète un superbe dessin de 1500 francs, & n’en parlons plus !!. – Dis au brave Dom qu’il vienne à l’Exposition, & toi n’y manque pas Mon Vieux Camarade. Tu verras que quand Cassiers exposera ici, il sera reçu sans difficultés, & sans que j’aie besoin de dire autre chose que : « n’oubliez pas de regarder le tableau N°… », & même sans que je dise rien du tout ! On ne demande ici aux gens que d’avoir du talent, mais on trouve cela nécessaire, de première nécessité, que veux-tu ?