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Paris mardi.
Mon Cher Vieux Liesse,
Tu peux venir quand tu veux, la chambre, (mais je te l’ai dit ! : Nue comme le crâne de Dommartin) est prête. Que les Dieux te soient propices ! La mer est grosse, prends ta ceinture de natation ! – Carlier quitte Paris, et repique vers Chooz. Je crois qu’il n’a pas tort : il aime les champs et c’est encore le vrai, quand on n’est pas né pour être roulé, de se mettre à l’abri du roulis ! – Mais toi, tu dois savoir ce que tu fais !
Je travaille à cou, & à nerfs tendus : besogne énorme, dettes, le train de derrière du diable ! Heureusement que je passe aux champs la moitié de ma vie, mais à la table de travail & non à vaguer. Que veux-tu ? C’est une période encore à passer, – dure à vrai dire.
À propos : je ne connais pas assez Otlet pour rien lui demander. Puis je me suis juré de ne jamais recommander personne, ma belle âme en a assez. Cela prend trop de temps. Je n’ai plus le loisir d’exercer des vertus, même celles qui ne coûtent rien. Mon stage d’homme est fini. Je n’ai eu qu’une minute hier pour t’écrire ce petit mot brûlant & brûlé.
Donc viens quand tu veux. Voici mon
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programme de cette semaine : Jeudi
aux champs, jusqu’a Vendredi soir. (Je serai Vendredi à quatre heures à l’atelier.) Je retourne aux champs Samedi à trois heures. – Retour à Paris Lundi soir. Si je ne suis pas à Paris le concierge t’indiquera la chambre N°11 dont il te remettra la clef. – Tu trouveras aussi chez le concierge, dans mon casier une lettre pour toi. –
À toi Mon Vieil et bonne chance ! mais il va falloir ouvrir l’œil, et le bon !
F. R
La chambre est louée & payée jusqu’au terme de juillet. Après cela tu jugeras si tu la veux garder ou la quitter.