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20 janv. 1888.
Mon Cher Ami
songez que depuis le 2 janv. 1888 je n’ai pas mis le nez – ni le reste, – dehors ; que j’ai encore aujourdhui une fièvre qui ne me quitte pas, avec une toux qui me secoue comme un peuplier, & m’empêche de faire même un croquis.
J’ai voulu travailler malgré tout. Le résultat a été simple : J’ai détruit deux planches ! J’espère Mardi matin sans faute remettre le cuivre à Delâtre. C’est l’ancien cuivre effacé retravaillé & remis en ordre. J’en ferai deux, pour mon plaisir, si je peux rester debout. J’ai eu un âne de docteur, qui m’a traité pour un commencement de pleurésie. C’était tout bonnement de la fièvre intermittente, violente, « aigue » & aggravée par un refroidissement. Je vais mieux, mais il me faut un vrai courage pour m’asseoir à mon établi, & je fais je vous l’assure, l’effort demandé par votre lettre. Il n’y a pas à s’en prendre à moi,
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ni aux hommes, mais à Dieu, tout simplement qui fait cet impair :
«Deus Impare gaudet! »
Et il fait noir ici ! on ne peut guère graver que trois heures par jour, songez donc !
Je vous serre bien la main
Fély R
Avez vous lu les livres de Rosny?
Je trouve cela très bien ; & cela m’a un peu coupé mes fièvres. C’est un homme savant, ce qui devient rare, en littérature. Un peu trop néologismesque comme vous. Est ce un crime ? Quant au livre tant prôné de Maupassant, je ne comprends pas beaucoup. Ma belle mère me raconte des histoires de bien autre saveur ! – Et d’un style plus verveux.
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Est ce que Marseille n’a pas illuminé le jour de votre départ ? Ah ! vous avez secoué cette petite grande ville !! Et seule la Dame si intéressante & si bonne en souffrira, je vous l’assure. Je connais tout cela, – de loin – heureusement. Mr & MmeBarroil sont en Algérie avec Uzanne.
Commentaire de collaboration
Source : Hélène Védrine, Correspondance inédite, Félicien Rops-Joséphin Péladan, Paris, Séguier, 1997, p. 236-237.