Numéro d'édition: 1844
Lettre de Félicien Rops à [Armand Rassenfosse]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23
Destinataire
Armand Rassenfosse
Lieu de rédaction
Saint-Méloir-des-Ondes, La Guymorais
Date
1895/09/07
Commentaire de datation
Le 7 septembre tombe bien un samedi en 1895.
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
II/6957/19/174
Collationnage
Autographe
Date de fin
1895/09/07
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, Cabinet des Manuscrits
Page 1 Recto : 1
La Guymorais par St Méloir des ondes. Ille & Vilaine) Samedi 7 septembre 1895.
Mon Cher très ami,
j’ai à te remercier de tout cœur de ta lettre qui m’a fait grand bien. J’ai particulièrement souffert de ces premières affres de la maladie. J’ai eu une vie trop heureuse et loin de me soumettre aux « coups du sort » je me suis révolutionné et je me suis mis à maudire les fatalités inéluctables, et un peu à trop désespérer de la vie. Ta bonne amitié qui m’est précieuse, est venue à mon aide, et aussi ma prouver que je n’étais pas trop abandonné de ceux qui me sont chers. Le droit de perdre courage ne m’est pas encore acquit, je peux encore travailler, lire, penser, peut être faire des choses belles et vivantes. C’est encore là de vraies joies et des bonheurs qui doivent se payer ! Aussi tâcherai-je de soumettre mes jours futurs à une philosophie plus calme, & dont mon âge aurait déja dû m’enseigner l’usage. La Sagesse s’apprend, même tardivement.
– Je te remercie surtout de la bonne pensée qui t’es venue de vouloir venir près de moi partager mes peines, et les soulager par ta présence. Mon cœur te remercie de cette gracieuseté du tien, et en apprécie toute la valeur, crois-le & je me reprends à l’espoir. Je n’ai pas croyance à une complète guérison car je me sens atteint aux sources vives de la Vie, mais je peux, – qui sait ? vivre quelque temps peut être et en me soignant bien, prolonger cette vie à laquelle je demandais encore la possibilité de faire quelqu’œuvre méritante.
Page 1 Verso : 2
Je vais écrire à notre bon docteur. Je ne l’ai pas encore fait et je m’en veux, mais il y a des choses qui m’ennuient toujours, et celle d’ennuyer les autres du récit de mes peines est de celle-là.
Je travaille ici ; et je vais me bâtir une petite maison en ce Paraclet. Haraucourt est ici depuis dix jours avec Eugène Demolder. Si tu pouvais venir ici avec le docteur, nous serions dans la joie, tâche de faire cela, rien de bien difficile ni de très couteux : aller & retour on arrive à St Malo pour 37 frs. On part le soir à 8 heures ¼ je crois, s’assurer dans le livret-Chaix de la véracité de ce que j’écris ; à 6 ¼ tu arrives à St Malo, tu me trouves en gare avec un bout de voiture et un imperceptible poney à 8 ½ nous sommes à la Guymorais, au dejeuner de la table de famille, Puis on fait ce que l’on veut et le lendemain, on recommence. Voilà, décide le docteur et décide-toi toi même. Le pays est beau. Les Marins disent que tout le mois de septembre sera beau. Viens vite je ne crois pas que tu regretteras le temps perdu, tu le regagneras. Viens !
À bientôt & bons Compliments à ta femme que tu remercieras pour moi de ses bons souvenirs, et embrasse tes beaux petits gas.
Félicien Rops
Détails
Support
1 feuillets, 2 pages, Vergé, Crème.
Dimensions
177 x 225 mm
Mise en page
Écrite en Plume Noir.
Copyright
KBR