Numéro d'édition: 1990
Lettre de Félicien Rops à [Théodore Hannon]
Texte copié

Expéditeur
Félicien Rops
1833/07/07 - 1898/08/23

Destinataire
Théodore Hannon
1851/10/01 - 1916/04/07
Lieu de rédaction
[Paris]
Date
1881/04/03
Commentaire de datation
Datation sur base de l'apostille et du cachet postal d'envoi.
Type de document
Lettre
N° d'inventaire
ML/00026/0110
Collationnage
Autographe
Date de fin
1881/04/03
Cachet d'envoi
1881/04/03
Lieu de conservation
Belgique, Bruxelles, Archives et Musée de la Littérature
Apostille
25-105 / 3 avril 1881 / s/ les vernis mous
Page 1 Recto : 1
Mon Vieux Théo,
Je t’envoie ainsi que je te l’ai promis
1° Le dernier état de la Femme au Trapèze. – Tout cela est devenu lourd & betât par la faute de cet immonde Cadart qui m’a forcé à mettre un pagne à la « dame » & qui dans ce moment là faisait tirer ses épreuves par un cochon qui ne savait pas ce que c’était qu’un cuivre & qui cirait cela comme ses bottes. C’est hideux & dépouillé noir & cru, mais il n’en existe plus d’autres épreuves – J’en ai tiré deux qui étaient des merveilles, elles sont parties, tu ne reconnaîtrait pas la planche
2° Le dernier état de la Chandelle Bonne planche, je trouve, en son voulu. & bonne épreuve un peu sèche ainsi qu’il convient.
3° Un bout d’épreuve japonaise, lettrine pour Mlle Claire-Duluc-Rops.
4° Épreuve rare de la « Boîte au lait » la planche chargée d’essais brutaux & toqués de Vernis mou.
5° Épreuve rarissime d’essais de vernis mou. Je ne t’envoie pas cela comme
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des modèles (Ces épreuves datent de 1878-79) – je te les envoie pour te montrer quel est mon entêtement lorsque je me suis mis quelque chose entre les sourcils – Vers 1878, j’ai eu la rage de reprendre mes essais de vernis mou, j’en avais fait deux essais en 1875 & qui avaient peu réussi. Le vernis mou était oublié depuis trente ans. Le dernier graveur au vernis mou Marvy était mort ! Il fallait donc tâtonner & aller de l’avant comme un pionnier américain « tâchant de retrouver à travers la Prairie les traces de premiers trappeurs » c’est ce que j’écrivais à Lemonnier. Mes premiers re-essais étaient déplorables, tu peux les voir sous la dame Louis XV qui tient le milieu de la planche, car ces croquis n’ont pas été faits d’emblée, mais petit à petit & l’on peut suivre les différents crayons & les différents grains des papiers cherchés. Et quels déboires, réussir un jour & n’être pas plus avancé le lendemain ! Enfin j’y suis et je ferais du vernis mou sur un trottoir. Tu verras dans la plus grande planche en comparant cette épreuve avec l’état que tu as précédemment les ressources que le vernis mou peut donner même à l’eau forte – Ainsi sur la petite femme qui joue du piano tu verras des traits de vernis mou (je t’ai expliqué longuement comment cela se faisait avec des « repêrages » comme disent les chromolithographes. C’est le premier essai que j’ai fait alors plus sûrement pour « poudrer » les traits des petits satyres du frontispice des Rimes de Joie afin qu’il y ait harmonie entre la femme faite entièrement au vernis mou & les Satyres qui étaient près d’elle. Ce grain court aussi dans les jupons de la femme.
Voilà encore une leçon pedante, mais c’est que je veux te tenir au courant, – Ces vernis mous ont beaucoup étonné les artistes parisiens. Ils en verront bien d’autres. Tout cela, c’est des vagissements. – Cependant le Pendu & le frontispice des Rimes avec les Folies Bergères sont des curiosités comme technique.
6° La femme hongroise demandée, c’est gravé sur le vernis de Lemercier en suivant les traits de la photographie qu’il recouvre, ce vernis bave toujours & est peu solide, les premiers états doivent être arretés avant leur coloration. Ce que je t’envoie est un premier état. Je reprendrai cela car le croquis fait labàs sur nature est assez vivant, en tous cas il est très juste, comme l’hélicanthème de l’avant plan qui fait sonner ces notes d’or dans la lumière de la Püsta le steppe hongrois ou la steppe si tu veux, mais j’ai mis le steppe pour protester contre Th. Gautier – steppe étant masculin dans toutes les langues des peuples à steppes.
Écris moi vite Vieux, & soigne l’affaire de la rue des Petits Carmes
J’attends ton cuivre & celui de Jehanne de chez le planeur qui est encore plus négligent
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que moi.
J’ai une désillusion mon Chromate de Potasse, mon bi-chromate même donne des tons lourds au tirage.
Encore une étoile qui file file & disparait !
– Enfin ! il nous reste assez de mordants pour nous faire craindre !!! – dirait mon ami Jules Barbey d’Aurevilly gentilhomme de Normadie – oui Monsieur !!!
À toi
Fély
Détails
Support
1 feuillets, 4 pages, Vergé, Crème.
Dimensions
179 x 226 mm
Mise en page
Écrite en Crayon Gris.
Copyright
AML