Lettre de Félicien Rops à [Léon Evely]

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C’est justement parce que vous avez été « douané » que je vous écrivais que vous deviez inscrire l’heure d’arrivée très exactement. C’est encore une saleté des coliseurs postaux ! Vous deviez recevoir les croquis Mardi à midi. J’ai la lettre de recipissé du 15 oct ! Et quand ces cochons là sont un peu encombrés, ils escamotent la lettre de voiture & ils expédient le lendemain. Je m’étais aperçu de leurs petites « crasses » & je vais les faire pinçer.

Pour les cuivres faites marcher cela je vous prie Mon Cher Evely. – Je vais vous en envoyer d’autres à faire fort vite, vous recevrez déja demain ou après demain au plus tard un dessin que je vais aller prendre chez Gouzien. Dans quelques jours je vous enverrai les 6 croquis & les 22 épreuves que je vous dois de notre compte arrêté au 18 octobre & que je trouve juste. Nous « marchons ensemble » comme disent les banquiers. À chaque envoi je ferai mon bilan.

Dans les titres de croquis vous changerez :

1° le titre la petite femme qui va se mettre au lit par « Seule »

2° Les montres créés par « La Genèse »

3° Le démon créant les monstrespar : Satan créant les monstres

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Dans les épreuves :

4° « Veille Lisant » par « Vieille ci-devant »

5°« l’épreuve du Pot au Lait » par la planche du Pot au Lait.

Gardez bien vos épreuves même les doubles, mes planches ne sont pas effacées à demi ni portée au planeur qui malin efface les traits de pointe sèche retablit tant bien que mal la planche & en fait tirer des épreuves à la diable ; (cela se voit beaucoup depuis « les grands prix » d’épreuves ;) les miennes sont plongées dans l’eau forte pure, pliées & martelées sur mon étau puis jetées au chiffonnier. Il y a des épreuves « sans grande valeur artistique » qui se vendent cher relativement.

Impossible de trouver une épreuve de « Mon arrière grand oncle » par exemple à moins de 40 ou 45 francs. Je ne comprends rien au commerce de gravures, les marchands savent à 5 frs près en un mois la valeur d’une planche effaçée. C’est fantastique de devination. on sait que je rachète mes vieilles planches (les cuivres) & on les fait des prix insensés aux tierces personnes que j’envoie pour les racheter. On veut vendre 500 frs la planche du frontispice du Millet de Piédagnel.

– Je vais vous envoyer dans une huitaine de jours des épreuves des Sataniques, les préfèrez vous de 1er État ou de 2e ? Je crois que je vais les recommencer comme dessin & vous les faire recommencer comme gravure d’après mes dessins en noir.

Cela dépendra d’une foule de choses.

Mais Mon Cher Evely, votre chambre

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« Rops » aura lieu. Elle n’aurait pu avoir lieu si vous ne me laissiez pas la latitude de vous envoyer des dessins d’un prix audessus de 4 croquis ! C’est bien simple. Le croquis notre étalon est fixé le plus honnêtement & le plus amicalement du monde par moi d’après les prix de la vente Darbelle, – un collectionneur, ornemaniste de son état & riche mort en Janvier dernier & qui avait acheté aux éditeurs une cinquantaine de croquis de moi. Les croquis ont passé de 15 à 40 frs. Ils étaient d’ailleurs fort anciens

Je fixe le croquis à 25 frs en moyenne. Voilà donc notre étalon établi. Quand j’ai un dessin plus important à mettre dans votre collection, je vais chez Conquet, la porte à coté je lui demande son prix & je fixe le prix de Conquet. Cela vous donne en outre toute facilité pour renvoyer ces dessins puisque le marchand est près à les recevoir.

Je pourrai vous envoyer des dessins d’une valeur de dix croquis c’est à dire de 200 à 250 frs. – Quand j’ai une jolie étude à l’huile ou à la cire, mes peintures étant rares, je vous l’expédierai & la chambre Rops aura lieu sans préjudice des albums. – J’ai toujours tenu mes études & les petits & les grands portefeuilles sont bondés. – Pour m’empêcher même de choisir parce que je vous enverrais tout de suite, je prends une pincée de ces études, je nettoie les bords, & j’expédie voilà.

Je vous le dis j’ai tant de travaux à faire que votre chambre aura lieu. Je compte faire l’année qui vient quelque chose comme deux cents photogravures & il aura de grands bains ! –

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Un mot vos grands cuivres sont un peu trop minces & même beaucoup. les tireurs se plaignent. C’est que nous donnons de belles pressions nous !

Et les planches gondoles comme des feuilles de roses. Quand on doit les redresser les grains en souffrent.

J’espère vous procurer les états que vous demandez : la dame au Carcel, la Goutte. l’Orphée, mais il faut les trouver il y en a deux ou trois de chaque planche. Je les trouverai mais il faut tomber dessus. Mlle Doucé avant sa déconfiture à vendu 80 frs une épreuve 3e État de la femme au Carcel. Je crois que c’est Braquemond qui la lui avait vendue. – N’oubliez pas de tenir le secret de nos travaux, pour les imbéciles qui croiraient que je fais tout fabriquer dans mes planches !

Et surtout pour tous les Bonvoisins du monde ! Et ils deviennent nombreux ! –